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Equipe de travail performante

Des équipes de travail plus performantes : les apports scientifiques

Dans un monde volatile, incertain, complexe et ambigu, l’intelligence et la performance collective représentent un enjeu de plus en plus important pour les organisations du travail, leur efficience et leur pérennité.

Ainsi, se pose la question de l’optimisation de cette performance et plus particulièrement de la composition des équipes pour la favoriser. En d’autres mots, comment constituer les équipes de travail les plus efficientes possibles ? La recherche scientifique nous apporte quelques éléments de réponse.

Les caractéristiques sociodémographiques des membres de l’équipe

Les premiers travaux publiés sur l’effet de la composition des équipes sur leur performance se sont intéressés aux caractéristiques socio-démographiques et socioprofessionnelles de leurs membres, avec la question suivante : ces caractéristiques, favorisent-elles ou nuisent-elles à la performance du groupe ?

Les résultats ont mis en évidence que les caractéristiques sociodémographiques des membres de l’équipe, tels que le genre, l’âge, ou encore le niveau d’études, n’ont que peu, voire pas d’effet sur la performance collective (Horwitz et Horwitz, 2007; Joshi and Roh, 2009). Il n’est nullement démontré que se référer à ces caractéristiques pour composer une équipe est un facteur de succès en matière d’efficience des équipes de travail.

La personnalité des membres de l’équipe

Les scientifiques se sont ensuite questionnés sur le rôle de la personnalité des membres de l’équipe dans la performance du collectif.

L’équipe de Peeters, chercheurs de l’Université technique d’Eindhoven (Pays-Bas), ont publié en 2006 une étude réalisée auprès de 527 équipes de travail dont l’objectif était d’explorer le lien entre la composition de l’équipe en matière de personnalité et sa performance. Pour appréhender les traits de personnalité, ils se sont reposés sur le célèbre modèle du Big Five.

Le rôle de l’agréabilité

Parmi les résultats obtenus, Peeters et ses collaborateurs ont démontré que le niveau moyen d’agréabilité des membres des équipes (c’est-à-dire la tendance à être compatissant et coopératif envers ses collègues) était positivement associé à la performance du groupe. En d’autres termes, plus les membres des équipes de travail avaient des traits d’agréabilité élevés, plus l’équipe était performante.

Traits de personnalité du Big 5

Peeters et ses collaborateurs ont conclu que l’agréabilité est un trait de personnalité particulièrement important dans la constitution des équipes parce qu’elle permettrait de maintenir l’harmonie sociale et de réduire la compétition et les conflits au sein du groupe.

Le caractère consciencieux

Ces chercheurs ont ensuite démontré que le niveau moyen de caractère consciencieux des membres des équipes (c’est-à-dire la tendance à être travailleur, orienté vers la réussite et persévérant) était également relié positivement à la performance du groupe. Aussi, plus les membres des équipes de travail ont des traits de caractère consciencieux élevés, plus l’équipe est performante. Ce résultat peut s’expliquer par le fait que les individus ayant un caractère consciencieux élevé adoptent davantage de comportements associés à l’organisation et à la planification des tâches, la réalisation d’objectifs et à la résolution de problèmes (Bell et ses collaborateurs, 2007).

La stabilité émotionnelle

Une autre étude scientifique menée par une équipe de chercheurs américains a établi que, lorsque les membres d’une équipe ont un niveau élevé d’extraversion (c’est-à-dire la tendance à rechercher l’interaction avec les autres)et de stabilité émotionnelle (c’est-à-dire la tendance à éprouver davantage d’émotions positives que négatives), ils sont également plus performants collectivement (Bell et ses collaborateurs, 2007). En effet, plus les individus sont stables sur le plan émotionnel, plus ils sont capables de gérer efficacement voire d’éviter les conflits et de rester concentrés sur la tâche à réaliser.

Ainsi, les résultats de la recherche scientifique indiquent que les traits de personnalité pourraient être considérés comme des critères de sélection lors du recrutement pour composer les équipes les plus performantes.

La diversité des valeurs dans l’équipe

La diversité des valeurs entre les membres de l’équipe a également suscité un intérêt parmi la communauté scientifique.

L’équipe de recherche américaine menée par María del Carmen Triana de l’Université Vanderbilt, situé dans l’Etat du Tennessee, s’est interrogée sur l’effet de la diversité des valeurs professionnelles et personnelles dans les équipes de travail sur leur performance.

Les risques de conflits

Ces scientifiques ont publié les résultats d’une recherche menée sur 24 425 équipes. Ils ont observé que plus la diversité des valeurs était importante dans les équipes de travail, moins il y avait de sentiment de cohésion, de coordination, d’efficacité et de performance dans le groupe. Par ailleurs, une diversité de valeurs accrue est également reliée à une recrudescence de conflits interpersonnels dans l’équipe.

Ainsi, les chercheurs concluent que les managers devraient porter plus d’attention à la convergence des valeurs entre les membres des équipes de travail lors de sa constitution. Les valeurs des candidats sont donc un indice important à prendre en considération dans le recrutement.

Similarité et innovation

Ces résultats peuvent être interprétés à la lumière du paradigme de similarité-attraction de Byrne (1971) soutenant l’idée que les individus éprouvent une attirance naturelle pour les personnes qui leur ressemblent parce qu’elles seraient plus susceptibles de s’entendre avec elles. Ainsi, les équipes homogènes en matière de valeurs seraient plus coopératives et travailleraient de manière plus fluide que les équipes hétérogènes.

Attention toutefois, si les travaux de recherche soulignent que la similarité dans les équipes de travail est en général favorable à leur performance, elle peut aussi être associée à un manque de créativité et d’innovation. En effet, la diversité dans les équipes de travail accroît la richesse des connaissances et des idées partagées. Cette richesse permet aux groupes d’identifier des solutions plus créatives et innovantes et de prendre des décisions plus réfléchies et de meilleure qualité (Byrne, 1971).

Conclusion

En l’état, la recherche scientifique apporte quelques éléments de réponse pour constituer des équipes de travail plus performantes. Certains traits de personnalité et des valeurs homogènes semblent être deux indices périphériques qui permettent d’accroitre l’efficience des équipes. Cependant recourir uniquement à ces caractéristiques porte le risque d’une forme de discrimination à l’embauche si le recrutement n’est pas effectué sur critères plus centraux et factuels, tels que les compétences techniques.

Toutefois, la recherche scientifique avance à grands pas et nous aurons prochainement l’occasion de vous partager les avancées les plus récentes sur le sujet de l’intelligence collective.


Pour aller plus loin

Bell, S. T. (2007). Deep-level composition variables as predictors of team performance: A meta-analysis. Journal of Applied Psychology, 92, 595–615. https://doi.org/10.1037/0021-9010.92.3.595

Byrne, D. (1971). The Attraction Paradigm. New York: Academic Press.

Jackson, S. E., May, K. E., & Whitney, K. (1995) Understanding the dynamics of diversity in decision-making teams. In R. A. Guzzo & E. Salas (Eds.), Team effectiveness and decision making in organizations (pp. 383-396). San Francisco: Jossey-Bass.

Horwitz, S. K. and Horwitz, I. B. (2007). The effects of team diversity on team outcomes: A meta-analytic review of team demography. Journal of Management, 33, 987–1015. https://doi.org/10.1177/0149206307308587  

Joshi, A. and Roh, H. (2009). The role of context in work team diversity research: A meta-analysis. Academy of Management Journal, 52, 599–627.  https://doi.org/10.5465/AMJ.2009.41331491

Peeters, M. A., van Tuijl, H. F., Rutte, C. G. and Reymen, I. M. (2006). Personality and team performance: A meta-analysis. European Journal of Personality, 20(5), 377–96. https://doi.org/10.1002/per.588

Triana, M. del C., Kim, K., Byun, S., Delgado, D. M., & Arthur, W. (2021). The Relationship Between Team Deep‐Level Diversity and Team Performance: A Meta‐Analysis of the Main Effect, Moderators, and Mediating Mechanisms. Journal of Management Studies, 58(8), 2137–2179. https://doi.org/10.1111/joms.12670